Face à votre père ou mère toxique, que ressentez-vous ? Avez-vous cette sensation désagréable et même quelques fois ce sentiment de culpabilité de redevenir à leur contact, cette petite fille peu sûre d‘elle qui a toujours cette impression d'avoir commis une bêtise et qui se sent systématiquement obligée de se justifier pour tout et n’importe quoi ?
Vous pensez intérieurement :
'' Ce n'est pas normal ! Je suis adulte et vaccinée ''. On aime bien cette expression !
'' Je suis autonome, j'ai mon appartement, mon travail, j'ai même fondé ma famille... je n'ai pas à me sentir diminuée, ni à me justifier et surtout je ne suis PLUS une gamine ! ''
Vous avez raison de vous révolter et de vouloir revendiquer votre statut d'adulte ! Il n'y a rien de plus naturel !
Vous retroussez donc vos manches, vous vous motivez et vous vous dites :
'' La prochaine fois, ça ne va pas se passer comme ça !! Je vais m'imposer ! Après tout, je suis une adulte...tout comme eux ! Il faut qu'ils arrêtent de m'infantiliser ! J'ai grandi depuis ! ''
Le jour J arrive ! Vous vous retrouvez face à votre père ou mère toxique et il suffit d'un regard, pour redevenir cette petite fille troublée par cette présence malaisante...
Pourtant cette fois-ci, vous étiez plus motivée que jamais !!! Vous aviez imaginé la scène, votre réaction, ce que vous alliez dire...sauf qu'une fois, face au parent toxique, ce n'est plus la femme désireuse de dominer la situation qui prend place, mais à nouveau cette petite fille craintive...
Il faut dire que le contexte ne vous aide pas ! Le parent toxique, a vite fait de vous ramener à cette condition d'enfant, car pour lui, vous n'avez jamais grandi ! Vous êtes toujours restée cette petite fille et son regard désapprobateur ou ses critiques incessantes à votre égard, vous le rappellent constamment...au cas où vous l'auriez oublié...
'' Je suis ta mère, je suis ton père, donc tu dois m’écouter ET me respecter ! Les parents ont toujours raison ! Je t’ai portée pendant 9 mois dans mon ventre, je t’ai nourrie, soignée, logée, je me suis sacrifiée pour toi et c’est comme ça que tu me remercies ? Tu n’as donc pas pitié de moi, après tout ce que j’ai fait pour toi ? ''
Ça vous parle ? Ça vous fait froid dans le dos ? Ça réveille peut-être en vous de douloureux souvenirs ? Ou ça vous semble peut être trop familier, parce qu’en tant qu’enfant de parents toxiques, vous les avez trop entendues pour ne pas dire subies et aujourd’hui, rendues à l’âge adulte, ça continue…
Nous connaissons toutes au moins UNE personne dans notre entourage proche ou éloigné, sous l’emprise de parents toxiques.
Malgré le fait qu’on en croise tous les jours à travers nos relations, nos connaissances ou de façon anonyme, que ça soit au travail, dans les transports, dans la rue, dans les magasins, le sujet de '' parents toxiques '' reste encore tabou, souterrain.
C’est comme si oser parler de parents toxiques, c’était quelque part désacraliser le parent et porter atteinte à la figure d’autorité qu’il représente naturellement.
Vous n'avez pas remarqué que dans les histoires pour enfants les plus anciennes et les plus connues comme Cendrillon, Blanche Neige, les malheurs de Sophie, Rémi sans famille, et autres, on en parle facilement ?
Les auteurs de ces histoires ont même tendance à décrire – et c’est ce qui est fascinant et troublant en même temps - avec une ultra précision, les agissements de ces parents toxiques et les condamnent fermement, invitant même le lecteur (enfants et parents confondus) à prendre clairement et fermement position du côté de la victime, à savoir, l’enfant.
Mais, bizarrement, de retour à la réalité, les choses s’inversent !
Lorsqu’un parent commet de façon répétée des actes cruels et innommables envers son enfant, la société prend naturellement position pour l’enfant - encore heureux - et se révolte contre les horreurs subies par l’enfant. Elle va même n‘avoir aucune difficulté à qualifier ces actes d’atroce, de barbare ou d’ignoble. On va aussi parler d’enfant victime, d’enfant abusé et violenté.
Mais quand il s’agit de se tourner et de diriger le spotlight sur la mère ou le père toxique, on commence à entrer dans une sorte de déni et de non-dit.
En fait, la société semble réticente à qualifier ouvertement la mère ou le père de cruel, de barbare, d’ignoble ou de toxique. En effet, elle sera beaucoup moins frontale et aura plus tendance à dire : le père, auteur de l’acte barbare, la mère, auteure de l’acte cruel ou le père de la victime, la mère de la petite India…sans jamais oser qualifier le parent de... toxique.
Ou bien pour l'évoquer sans l'évoquer, la société va mettre en avant la maladie éventuelle du parent toxique pour expliquer ses actes.
Rarement voire jamais, vous lirez dans les journaux ou entendrez à la TV : le père barbare ou la mère toxique, auteure de l’acte X,Y,Z…
Pour moi, ça reste une véritable problématique !!! Parce qu'au final, tous les paramètres ne sont pas pris en compte!
On ne peut pas juger une affaire ni un fait de manière totalement éclairé, si tous les paramètres, je le répète, ne sont pas pris en compte.
Parce qu'Il y aura forcément des zones d'ombre qui seront ignorées, alors que l'on sait très bien que ce sont ces mêmes zones d'ombre qui constituent le plus souvent l'élément clé du dossier et qui forment le nœud du problème. Tant qu'on n'aura pas prêté attention à ce nœud et qu'on n'aura pas pris le temps de le défaire, c'est comme si on n'aura rien fait !...
Vous me suivez ?
Je vais vous préciser les paramètres dont je fais référence afin que vous puissiez comprendre là où je veux en venir :
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Le 1er paramètre est celui d‘enfant victime qui est naturellement reconnu
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Le 2ème paramètre, donc le paramètre '' acte de cruauté '' est aussi facilement qualifié
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Mais concernant le 3ème paramètre, c'est à dire le fait de qualifier la vraie nature du parent, il sera tronqué ! Ça ne sera pas le paramètre '' parent toxique '' qui sera pris en compte, mais juste son statut de..." parent ".
Du coup, en passant de '' parent toxique '' à ‚ simplement '' parent, auteur de violences sur son enfant…'', c’est comme si on faisait inconsciemment une dissociation entre l’acte et le parent, ce qui revient quelque part à rendre le parent… neutre : ce ne sera donc pas le parent toxique qui aura commis des actes de barbarie envers son enfant, mais simplement un parent, qui aura commis des actes de barbarie…
Vous voyez la nuance ?
Pour ma part, tronquer une partie de la vérité en n’osant pas qualifier le parent de toxique ou d’ignoble, mais seulement l’acte de toxique ou d'ignoble, c’est comme si on le déresponsabilisait !
Quelque part, c’est comme si on disait haut et fort ET sans état d’âme :
" Du calme ! C’est l’acte qui est mauvais, c’est l’acte qui est toxique ! Pas le parent ! Malgré la cruauté des actes, ça reste tout de même son père, sa mère !''
Mais bien sûr qu'aux yeux de la société, ça reste son père et sa mère ! MAIS...son père ou sa mère… toxique !
Ce n’est pas la même chose et ça fait toute LA différence!
S’agissant du parent, en enlevant le qualificatif de toxique ou autre, c’est comme si on enlevait la substance de ce qui rend l’acte condamnable.
Pour illustrer mon propos, je vais vous donner un exemple. L'image sera un peu gore, mais bon… en même temps, quand on parle de sujet tabou ou considéré comme tel, on ne s'attend pas à voir tomber du ciel des bisounours...!
Donc, pour revenir à mon exemple : c'est comme si en jugeant une personne qui a commis un meurtre, le juge décidait de se focaliser non pas sur le meurtrier - l'auteur de l'acte - mais principalement sur l'instrument qui a servi de crime, à savoir le couteau.
En raisonnant de cette manière, c'est comme si on accordait une responsabilité au couteau, un pouvoir et une pleine puissance qu'il n'a certainement pas, puisqu'à la base, le couteau est un objet inanimé !
Vous n'êtes pas sans savoir que l'arme du crime n'a de pouvoir que ce que l'auteur-e de l'acte veut bien lui donner.
Demain, un couteau ne va pas voler pour aller blesser quelqu'un ! Pour qu'on puisse parler de victime, il faudrait qu'une personne prenne la décision de s'en saisir et de l'utiliser de manière mal intentionnée.
Donc, si j'en reviens au parent toxique, le fait de qualifier seulement l'acte de toxique et de ne pas oser qualifier de toxique, cruel, barbare ou autre, le parent qui commet des actes de cruauté envers son enfant, ce n'est pas lui accorder toute la responsabilité qu'il est supposé porter, surtout en tant que parent ! Et c'est même quelque part, se rendre complice et le ramener à sa condition de parent lambda. Or, vous ne le savez que trop bien qu’il y a une différence flagrante entre un parent lambda (donc…neutre) et un parent toxique.
Une autre façon de voir les choses...Vous n’êtes pas sans savoir qu’il y a une différence nette entre un serpent lambda (c'est à dire non venimeux) et un serpent venimeux ?
Même si vous craignez les serpents, si l’on vous dit que le serpent qui est juste devant vous est non venimeux, vous serez un peu plus rassuré-e que si l’on vous disait que vous aviez affaire à un serpent venimeux, sachant que les conséquences, s’il vous mord peuvent être dramatiques.
Rappelez-vous de la fameuse toxine qu'on a vue dans l'épisode 0 qui peut entraîner des dommages irréversibles voire...la mort!
Vous voyez là où je veux en venir ? En ne qualifiant pas le parent de ce qu’il est en réalité :
- On minimise le drame
- On ne respecte pas l’enfant
- On lui fait prendre volontairement des risques qui peuvent être fatals !
On a toutes et tous entendu des histoires terribles d'enfants qui se faisaient battre par leurs parent toxiques et qui ont été retirés temporairement de leur garde pour ensuite revenir plus tard et décéder sous leur énième et fatal coup !
En entendant ce genre d'histoires, on a la rage et on se dit que ce genre de drame aurait pu être facilement évité car c'était évident que le parent était toxique et qu'il allait recommencer !
C'est évident pour vous, c'est évident pour moi, parce que par expérience et malgré nous, nous savons reconnaître un père ou une mère toxique...
Mais est-ce évident pour les personnes qui ont jugé l'affaire ? Apparemment, non...
À votre avis, pourquoi ?
Parce que seul l'acte a été qualifié de toxique et de cruel, mais pas le parent ! Le parent aurait été qualifié de toxique, le jugement vis-à-vis de l'enfant aurait été différent.
Pourquoi aurait-il été différent ?
Parce que dans le cas où nous avons affaire à des violences envers un enfant, par définition, le parent toxique a pour principe de perpétuer ces violences de manière volontaire et sur la durée dans l'unique but de faire souffrir son enfant.
Donc, en ayant en tête cette image du parent toxique qui ne peut s'empêcher de faire délibérément du mal à son enfant, on s'imagine facilement l'issue de l'histoire si l'enfant retourne chez ce parent...
Par conséquent, comme on sait d'avance ce qui va se passer - vu la nature toxique du parent - on prend des dispositions et on protège l'enfant en conséquence, sans le renvoyer chez lui alors que rien n'a été fait, ni mis en place du côté du parent toxique - comme un suivi médical poussé et approprié à sa pathologie - pour garantir la sécurité de l'enfant…
Si on ne considère pas le facteur important de '' parent toxique '', on aura tendance à considérer les actes de violence comme des faits isolés, et que le temps faisant son œuvre, d'ici quelques mois, le parent retrouvera ses esprits et l'enfant pourra retourner chez lui !
Or, on sait très bien qu'un parent toxique – à moins d'avoir pris conscience de sa toxicité et d'avoir la volonté d'entamer un travail auprès d'un professionnel – ne souhaite surtout pas changer. En effet, pour lui, il agit dans son bon droit…en tant que parent, en tant que figure d'autorité.
Si la société ou la justice ne lui fait pas prendre conscience de sa nature déviante en le qualifiant de toxique, comment voulez-vous qu’il y ait tune prise de conscience du côté du parent ??? C’est comme si comme on si on disait : l’acte est cruel, mais toi tu restes une bonne mère.
Je le répète pour que ça rentre bien, il y a clairement une différence entre une mère lambda et une mère toxique. Les intentions des deux mères et les conséquences de leurs actes envers leurs enfants sont clairement opposées !
Donc appelons, un chat, un chat, confrontons la vérité pour faire avancer le débat et trouver les outils appropriés pour régler cette problématique de parents toxiques.
Tant qu’on sera dans la superficialité, le problème sera logiquement traité de façon légère et très peu de professionnels continueront à négliger la problématique du parent toxique, ce qui impliquera - comme c’est le cas actuellement - de prendre à la légère les traumatismes des enfants, et ceux des enfants devenus adultes. Cela impliquera également de ne pas les considérer suffisamment ou de se sentir démunis face à eux, faute d’outils appropriés.
Aussi, tant qu’on continuera à protéger le parent toxique, sous prétexte qu’il est parent :
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Il continuera sans scrupules de faire inlassablement et volontairement du mal à ses propres enfants, pensant qu'il a tous les droits
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Il ne pourra pas non plus bénéficier d’une aide appropriée – celle qu’il aurait dû avoir durant son enfance - faute d’outils et de négligence de la part de la société
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Il y a aussi de fortes chances que l’enfant plus ou moins négligé sous couvert de protéger le parent toxique, une fois adulte, reproduise inconsciemment les travers de ses propres parents toxiques sur ses propres enfants et qu'il construise par voie de conséquence, sa vie sur des sables mouvants
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Au final, la société continuera de partir à la dérive car le fondement de la société reste la famille.
Pour ma part, on baigne clairement dans l'hypocrisie ! Lorsqu'en dehors de la sphère familiale, un homme commet un meurtre ou un viol sur des mineurs, la société et même la justice, n'a pas de mal à qualifier le criminel d'ogre, de monstre et de tueur !
Exemple, j'ai fait des recherches sur internet concernant le le meurtrier de la petite Estelle Mouzin disparue le 9 Janvier 2003. Sur la 1ère page google, je tombe sur différents articles qui le surnomment systématiquement d'ogre : " l'Ogre des Ardennes ". Lorsque je vais sur sa fiche Wikipédia, il y a aussi 4 surnoms qui sont listés dont les 3 suivants sont avec une majuscule :
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L'Ogre des Ardennes
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Le tueur des Ardennes
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Et le Monstre des Ardennes
Pourtant, ce meurtrier – même s'il a commis des crimes horribles en dehors de la sphère familiale – était tout de même un père de famille qui a commis l'innommable envers des enfants...
Il aurait commis ses mêmes actes envers ses propres enfants, pas sûr qu'on lui aurait attribué - avec la complicité de la justice - tous ces surnoms....
Vous voyez l'incohérence ???
Vous constaterez que je n'ai pas encore véritablement répondu à la question : '' Pourquoi le parent toxique reste-t-il un sujet tabou? ''
En fait, dans cet article qui fait office d'introduction, j'ai pris le temps de réfléchir et de mettre en lumière la stratégie souterraine mise en place par la société avec la complicité de la justice pour protéger, épargner et déresponsabiliser le plus possible le parent toxique.
Je rappelle que la stratégie consiste à faire une dissociation entre le parent et l'acte sans jamais qualifier le parent de toxique ou autre.
En général, on sait plus ou moins les raisons qui font du parent toxique un sujet tabou, en revanche, on s'attarde beaucoup moins voire pas du tout sur la ou les stratégies mises en place pour l'entretenir. Or, si l'on a toutes les cartes en main : à savoir la stratégie mise en place et les raisons de l'appliquer, ça donne à la victime plus de poids pour renverser la vapeur à son avantage et dénoncer les failles du système sociétal et juridique.
C'est pour cela que j'ai volontairement pris du temps de décortiquer la stratégie mise en œuvre dans le cas du parent toxique. J'avais vraiment envie de déclencher une prise de conscience de ce côté-là !
Une stratégie n'est pas mise en œuvre sans raison ! Pourquoi fait-on du parent toxique un sujet tabou ? C'est ce que nous allons voir dans le prochain article !
En attendant, je vous dis à bientôt et vous souhaite une bonne cure de DETOX Parents Toxiques pour une liberté...NON négociable !